Depuis la première édition du concours CGénial en 2008, ce sont au total pas moins de 80 000 élèves qui ont été mobilisés autour de près de 4 000 projets scientifiques et technique inscrits. Le succès du concours se construit notamment grâce à l’implication des enseignants qui soutiennent les élèves dans la construction de leur projet.

« Sciences à l’École » a recueilli le témoignage de plusieurs enseignants qui exercent en lycée : ils racontent leur parcours, leur motivation et leur démarche visant à rendre les élèves acteurs de la construction de leurs savoirs.

FOCUS sur le Lycée Douanier Rousseau à Laval avec le témoignage de Patrice MICHEL, professeur de physique-chimie, enseignant référent du concours CGénial dans l’académie de Nantes.

Le lycée Douanier Rousseau à Laval (académie de Nantes) – Crédits photo : site fr.wikipedia.org


Pouvez-vous présenter votre formation scientifique et votre parcours d’enseignant, notamment au lycée Douanier Rousseau ?

Après mes études  à l’Université de Caen, l’obtention d’une maitrise de physique et ma réussite aux concours d’enseignement, j’ai été affecté sur plusieurs postes et notamment pendant 9 ans dans un lycée rural dans l’Orne. En parallèle, j’étais formateur pour les nouveaux programmes de l’an 2000, mais très vite je me suis également engagé pour la culture scientifique à travers des médiations entre les établissements scolaires et les centrales électriques de la région puis à travers l’animation d’ateliers scientifiques ou clubs scientifiques auprès de groupes d’une vingtaine d’élèves de mon lycée.

À mon arrivée au lycée Douanier Rousseau à Laval, un établissement au profil « théâtre » et « arts plastiques», j’ai poursuivi cet engagement : à l’extérieur, à travers des missions de coordonnateur territorial auprès de la  délégation académique à l’éducation artistique et à l’action culturelle (DAAC) de l’académie de Nantes, à travers l’organisation d’une journée d’actualisation des connaissances scientifiques pour les enseignants de l’académie et à travers la mission de référent académique du concours CGénial ; mais également au sein de mon établissement, où depuis 2009 j’anime un club scientifique, devenu par la suite un atelier scientifique et technique (AST) , permettant à des petits groupes de mener des projets de recherche autant que possible innovants.

Qu’est-ce qui vous motive à inscrire des projets au concours CGénial ? Quel intérêt les élèves trouvent-ils à y prendre part ?

Lorsque les élèves sont motivés, je leur propose de participer au concours CGénial sans leur dévoiler ce que cette participation pourra leur apporter. Leurs réactions pendant le concours et leurs témoignages ultérieurs, parfois des années après, prennent  alors d’autant plus de valeur. Dès le début d’un projet, la perspective d’une participation à un concours comme CGénial leur fixe un objectif dans le temps, objectif pour lequel ils se mobilisent. Ils comprennent qu’ils devront partager en présentant et expliquant leurs travaux, puis qu’ils pourront beaucoup échanger avec de nombreux autres élèves, des chercheurs, des ingénieurs, bref …tout le contraire de l’idée fausse du travail de laboratoire de recherche, considéré encore par certains comme austère et solitaire.

Patrice Michel a supervisé le projet Peut-on faire de la chimie avec une petite goutte ?, mené par les élèves David Barbin et Louenn Colineaux. Le projet a remporté le très convoité prix EUCYS au concours CGénial en mai 2021. Ce premier prix a permis aux deux élèves de représenter la France en septembre 2021 au concours européen de projets scientifiques EUCYS organisé en Espagne : ils y ont remporté le prix du meilleur projet de la sélection dans la catégorie Chimie.

– Comment procédez-vous chaque année pour construire un nouveau projet ? À quel point les élèves interviennent-il dans les choix à effectuer ? Quel est leur degré d’implication et d’autonomie dans les actions menées ?

À chaque groupe, une nouvelle aventure. La règle est qu’il n’y a pas de règle justement, ni dans la formation d’un groupe, ni dans la définition d’un projet de sa mise en place et de son déroulement. Les maîtres mots sont adaptation, autonomie et liberté.

Un projet peut naître dans le laboratoire d’un chercheur lors d’une visite, dans la tête d’un élève ; il peut être sélectionné parmi des pistes que je propose.

Progressivement, j’ai réussi à aménager une réserve afin de permettre aux élèves d’installer les expériences et dispositifs… Ils peuvent s’y rendre dès qu’ils le peuvent en ma présence : pause déjeuner, heures de cours libérées, après les cours, le mercredi après-midi et souvent pendant les vacances, afin de poursuivre leurs travaux. Ce local favorise clairement l’autonomie des élèves et leur implication dans leur projet qui devient alors très vite bien supérieure à celle qui serait la leur dans un cadre de fonctionnement plus rigide.  

– À quel point la subvention versée chaque année par « Sciences à l’École » et la Fondation CGénial est-elle déterminante au développement des projets ?

Les projets sont des projets de recherche scientifique, autant que possible innovants. Le matériel est soit indisponible au sein d’un lycée, soit il s’agit de consommables. L’apport d’une subvention extérieure est indispensable pour permettre les achats et ne pas impacter sur le fonctionnement classique des laboratoires de sciences du lycée dans lequel le projet des élèves doit s’intégrer le plus harmonieusement possible.

Le projet « Can sound be seen ? » défendu par trois élèves du lycée Douanier Rousseau (Maude Leriche, Maëva Loisnard et Nicolas Metay), a remporté le premier prix CASTIC lors de la finale nationale du concours CGénial organisée en mai 2016 au lycée Janson-de-Sailly à Paris. Les trois élèves se sont rendus en Chine, à Shangaï, au mois d’août 2016, pour représenter la France au concours international de projets scientifiques CASTIC.

– Pouvez-vous détailler votre histoire avec le concours CGénial au sein du lycée Douanier Rousseau, ainsi que vos participations à d’autres concours ? Pouvez-vous nous faire part d’une participation au concours CGénial qui vous a particulièrement marqués vous et les élèves, une anecdote, un souvenir ?

Les différents groupes que j’ai encadrés au lycée ont remportés de nombreux prix : 4 participations et premiers prix au concours CGénial suivies de sélections pour les concours Castic à Shanghaï (2016), concours Eucys à Varsovie 2014 et Salamanque 2021, forum « Step into the future » à Moscou 2021. Les élèves y ont remportés 4 prix internationaux.

Par ailleurs ils ont remporté 7 premiers prix aux concours des Olympiades nationales de Physique. A deux reprises, ils ont représenté la France au concours Isef à Phoenix aux USA en 2013 puis à Pittsburgh en 2018. Ils y ont remporté un prix international.

D’autres manifestations telles que les Exposciences locales (Laval) ou internationales (Moscou 2011, puis Gdynia 2018), le concours « Faites de la Science »  organisé par les universités scientifiques et piloté par le CDUS, ont contribués fortement également à valoriser les travaux des élèves. Les élèves ont été également récompensés à l’académie des sciences à deux reprises pour l’ensemble de leurs travaux.

Les bons souvenirs et les anecdotes ne manquent pas. Un très bon  souvenir  est celui de la finale nationale au lycée Janson de Sailly en 2016. Il faisait beau et tous les groupes ont exposé dans l’une des cours du lycée. L’ambiance y était chaleureuse et la ministre de l’époque, Mme Vallaud Belkacem, avait rendu visite aux élèves participants sur leurs stands. Mes élèves présentaient lors de cette édition leur projet «Peut-on voir le son ? ». Ce projet avait pour ambition de photographier le son par une méthode originale mise en place dans les années 1960 par un ingénieur américain de la Nasa, Winston Kock, méthode oubliée des chercheurs acousticiens depuis. Les élèves ont pu réactualiser cette méthode en profitant notamment de la numérisation des images. Des recherches sur internet, avec l’aide de Mélissa Malvoisin, chargée de mission au CCSTI  Zoom de Laval, ont permis de prendre contact avec les descendants de Winston Kock, notamment de sa fille résident à San Francisco et avec qui nous avons pu échanger. Surprise et heureuse que des jeunes aient repris les travaux de son père tant d’années après, elle a envoyé au groupe quelques livres dont l’un que son père lui avait dédicacé et que nous conservons précieusement.

Le projet « Can sound be seen ? » défendu par trois élèves du lycée Douanier Rousseau (Maude Leriche, Maëva Loisnard et Nicolas Metay), a été honoré suite à sa participation au concours international de projets scientifiques CASTIC en mai 2016. Les trois élèves et leur professeur Patrice Michel ont eu l’honneur d’être invités par l’Académie des Sciences. Il ont été félicités par les académiciens Bernard Meunier (à droite), et Pierre Encrenaz, président et cofondateur de « Sciences à l’École » (à gauche). Crédits photo : Académie des Sciences.

– En quoi la participation à une telle démarche de projet peut-elle déclencher des vocations scientifiques chez les jeunes ?

Il suffit de patienter et d’attendre quelques années pour se convaincre de l’importance des concours pour confirmer ou déclencher les vocations scientifiques. Les élèves ont le recul suffisant et les témoignages prennent d’autant plus de valeur. Deux de mes anciens élèves qui ont découvert péniblement les bases de l’électronique pour les besoins de leur projet naissant, m’ont annoncé récemment qu’ils sont désormais ingénieurs en…électronique, alors qu’ils n’avaient jamais imaginé un tel parcours. Les nombreuses rencontres avec les chercheurs et ingénieurs partenaires ou membres des jurys des concours, permettent aux élèves de découvrir les métiers scientifiques, mais également, à travers  les comparaisons entre leurs travaux et ceux des professionnels, de leur faire prendre conscience des qualités nécessaires à toute activité scientifique : la curiosité, la réactivité, la patience, l’humilité, l’esprit critique, le travail en équipe etc… des qualités bien utiles quelque soit par la suite le parcours d’orientation des élèves.

– En quoi consiste votre rôle d’enseignant référent du concours CGénial dans l’académie de Nantes ?

Lorsqu’on m’a proposé en 2014 de remplir la mission de référent du concours pour mon académie, accepter m’a paru être une évidence tant je connais l’impact de ce concours auprès des jeunes. Même si les contextes de travail d’un établissement à l’autre diffèrent tout comme les pédagogies, les échanges sont très facilités avec les collègues qui s’engagent dans ces projets car tous convaincus de l’apport des concours pour les élèves et la valorisation qu’ils représentent.

Ma mission est donc d’encourager, notamment en cette période difficile, tout engagement d’un collègue auprès des jeunes et de contribuer au rayonnement du concours dans l’académie.

Patrice Michel, dans le laboratoire du lycée Douanier Rousseau, sur le mur duquel sont affichés les souvenirs des multiples projets menés et récompensés avec ses élèves.

– Un message pour convaincre les collègues qui ne connaissent pas le concours CGénial, de s’y inscrire ?

Les collègues hésitants craignent un surplus de travail important, bénévole qui plus est,  de nombreuses difficultés à surmonter…  et ils ont parfaitement raison!

Mais souvent ils ne mesurent pas ce qu’une telle démarche peut leur apporter : ils vont rencontrer bien d’autres collègues et organisateurs dans des ambiances toujours positives et stimulantes. En encadrant les élèves, avec une pédagogie libre voire originale, ils vont également apprendre. Leur rapport aux élèves va très souvent évoluer car ces derniers, vont faire bien davantage qu’apprendre la science à leurs côtés. Ils vont la vivre !          

Alors oui, j’encourage mes collègues à se lancer dans l’aventure CGénial !

Pour tout savoir sur cet atelier, le projet actuellement mené par les élèves, l’historique de l’atelier avec les anciens projets, les plus belles photos :

https://www.ateliersciencerousseau.fr/

Crédits photos (sauf mention contraire) : Patrice Michel-lycée Douanier Rousseau

Retrouvez toutes les informations sur le concours CGénial en cliquant sur les liens suivants :

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